Exégèse de l’évangile du dimanche 30 juin
Exégèse de Lc 9,51-62. Extrait de Feu Nouveau 56/4
L’évangile de Luc réserve un développement considérable au récit du voyage de Jésus à Jérusalem. À la différence de Marc, qui fait arriver Jésus dans la région de la Judée en 10,1 et entrer à Jérusalem en 11,1-11, Luc étend la montée à Jérusalem sur plus de neuf chapitres (9,51-19,28). L’étendue littéraire de cette longue route correspond à l’importance du chemin sur lequel Jésus s’engage en allant à Jérusalem. L’évangile de ce dimanche constitue l’introduction à cette longue section et donne un aperçu des thèmes qui seront développés dans la suite. Jésus va au-devant du rejet qu’il avait annoncé peu de temps auparavant et prépare ses disciples à leur mission future. Le passage réunit un court récit propre à Luc et trois très brefs dialogues entre Jésus et des candidats-disciples.
La première partie dessine un portrait très contrasté de Jésus et des disciples. L’indication temporelle du début du v. 51 vise par sa formulation solennelle (littéralement « quand s’accomplissaient les jours de son enlèvement ») non seulement la proximité de la mort de Jésus, mais aussi le temps jusqu’à l’ascension. Le terme « accomplir » exprime l’idée que ce qui arrive, arrive au moment où Dieu l’a voulu. Pour signifier la détermination de Jésus à se soumettre à la volonté de Dieu, Luc emprunte au Premier Testament l’expression imagée « il rendit ferme sa face » (traduite ici « avec courage » ; « résolument » dans BJ et TOB).
L’incident qui se produit dans le village des Samaritains illustre de façon anticipée comment Jésus va vivre le rejet dont il fera l’objet à Jérusalem. Il révèle aussi la difficulté des disciples à accepter ce rejet. Envoyés en messagers, à l’image du Baptiste, pour préparer sa venue (1,4), ils envisagent comme celui-ci, le feu du jugement (1,17) en réponse au refus d’hospitalité des Samaritains. Ils n’ont pas encore compris le vrai sens de la "messianité" de Jésus. Mais celui-ci ne se laisse pas tenter et repousse leur projet de violence en les réprimandant.
Dans la deuxième partie de notre passage, trois exemples illustrent les conditions d’existence du disciple. Le premier cas suggère que le disciple doit accepter de renoncer au sentiment de sécurité lié au « chez-soi » et être prêt à s’engager toujours sur de nouveaux chemins.
Les deux autres ont deux points communs. Les deux interlocuteurs demandent à Jésus de faire quelque chose avant de le suivre et dans les deux cas, Jésus parle du royaume de Dieu. Vouloir enterrer les morts ou faire ses adieux peut avoir comme sens de vouloir maintenir une relation qui s’est terminée. Leur interdiction montre la radicalité de l’engagement à la suite de Jésus. Non que Jésus encourage l’irrespect envers les morts ou les parents. L’exigence est poussée à l’extrême pour signifier la priorité de la recherche du Royaume. Que l’on voit dans le troisième exemple, une allusion au récit de l’appel d’Élisée (1R 19,20) ou simplement une image empruntée au travail des champs, la décision de suivre Jésus implique de se détacher du passé et de regarder sans regret vers l’avenir.
Marie-Élisabeth Kiessel