Feu Nouveau : la revue de référence pour préparer la messe du dimanche!

La célébration en l’absence de prêtre

  • Propositions de déroulements
  • Textes et prières
  • Questions pour un partage autour de la Parole
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La formation

  • Articles de formation biblique et liturgique
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Les lectures

  • Commentaires approfondis
  • Homélie
  • Méditation
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L'attention aux enfants

  • Suggestions pour accueillir les enfants
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La célébration

  • Monitions et prières
  • Chants adaptés
  • Mélodies pour les nouvelles antiennes du lectionnaire
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Exégèse de l’évangile du dimanche 31 août

Exégèse de Mt 16,21-27

Extrait du Feu Nouveau 57/5

L’importance d’écouter

La confession de Pierre à Césarée de Philippe est bien connue (cf. dimanche précédent). Simon-Pierre a proclamé l’identité véritable de Jésus, « Christ et Fils du Dieu vivant » (Mt 16,16), sur l’arrière-fond des tentatives limitées d’approcher, en termes prophétiques, sa personne et sa mission. En réponse, Jésus a révélé à Simon-Pierre sa véritable identité, qui consiste à devenir la pierre sur laquelle le Seigneur bâtira son Église (cf. Mt 16,18). La scène s’achève par l’imposition du silence, ce « secret messianique » que Jésus invite chacun de ses interlocuteurs à garder. Mais c’est un silence habité ; non pas l’absence de parole, mais l’écoute attentive, de la part des disciples, de l’enseignement du Seigneur. Ils doivent se taire pour écouter Jésus leur enseigner sa véritable identité. C’est bien le sens du v.21 : Jésus « commença à leur montrer » ce qui le concernait. La phrase grecque est admirablement construite : le silence messianique imposé n’est pas un terme, mais un commencement grâce auquel Jésus pourra enseigner ce qui doit « lui » arriver lors de son départ vers Jérusalem.

L’annonce de la passion

La première annonce de la passion a lieu ici, en un enchaînement de termes — souffrir, être tué, ressusciter — que l’on retrouvera dans les deux autres annonces de la passion, avec quelques variations (cf. Mt 17,22-23 : être livré, être tué, ressusciter ; et Mt 20,17-19 : être livré, être condamné à mort, être bafoué, flagellé, mis en croix, ressusciter). Toute la phrase repose sur un petit mot grec : dei (il faut que). Il n’y a là aucune nécessité absolue et aveugle, mais la logique de la volonté divine, bien exprimée, dans l’évangile de Matthieu par la référence aux Écritures souvent citées depuis l’évangile de l’enfance : « cela advint afin que s’accomplît l’oracle prophétique... » (Mt 1,22 ; 2,5.15.17.23 ; etc.). Dans ce projet divin, les hommes ont un rôle à jouer, librement, d’accueil ou de refus du Messie. L’annonce de la passion éclaire déjà la suite du récit en distinguant des catégories d’opposants au Christ : les anciens, les grands-prêtres et les scribes (v.21). Mais les deux autres annonces de la passion élargiront le spectre des personnes impliquées dans la mort du Christ, allant jusqu’à parler « des mains des hommes » (Mt 17,22) et des « païens » (Mt 20,19), catégories très universelles.

Les reproches de Pierre

La réponse de Pierre à cette première annoncée est immédiate : il attire Jésus vers lui, en le prenant à part (v.22) : c’est un geste d’appropriation, un mouvement égocentrique qui augure déjà d’un refus d’entrer dans l’altérité du message de Jésus. Et Pierre « lui fit de vifs reproches ». L’expression cache un verbe grec original, epitimaô (rabrouer, morigéner) qui, jusqu’ici dans l’évangile, est toujours utilisé par Jésus pour chasser les esprits mauvais, les vents contraires ou les personnes importunes (cf. Mt 8,26 ; 12,16 ; etc.). C’est comme si Pierre « exorcisait » Jésus de ses pensées erronées et défaitistes, comme s’il estimait que Jésus, pour prononcer de telles paroles, devait être possédé d’un esprit mauvais. Le verbe est violent, complété par la parole de Pierre qui dit à la fois que Jésus est Seigneur (kurios) mais refuse ce qui doit arriver : « Cela ne t’arrivera pas ». Et Jésus se retourne alors — pour regarder tous les disciples présents, selon l’évangile de Marc (Mc 8,33) — pour inviter Pierre à passer derrière lui (v.23). Il faut bien comprendre ces mots comme une invitation, et non un rejet : passer « derrière moi » (opisô mou) signifie suivre, comme cela sera aussitôt dit au v.24 : « si quelqu’un veut venir derrière moi (opisô mou) ... qu’il me suive (akoloutheitô) ». Certes, Jésus affirme que Pierre est un Satan au moment où il l’empêche d’aller de l’avant, en refusant la perspective de sa livraison, de sa mort et de sa résurrection. On sait que le mot hébreu satan signifie l’ennemi, l’adversaire, l’accusateur, bien traduit en grec par diabolos, le diviseur, celui qui refuse le projet de Dieu. Pierre n’est pas stigmatisé par une condamnation définitive, mais lui est révélée la vérité de son attitude, qui fait de lui un « obstacle », une « occasion de chute » (en grec, un scandalon) : ses pensées ne sont pas celles de Dieu.

L’attitude du disciple

Viennent alors les conditions que Jésus pose pour être dans la vraie attitude du disciple qui veut « venir derrière » son maître (v.24) : se renier soi-même, se charger de sa croix et suivre Jésus. Le mot « suivre » vient en fin de liste, car il n’est que la dernière étape. La mise en mouvement doit être précédée d’une prise de distance avec soi-même, d’un « reniement » de soi — tout le contraire du geste de Pierre qui attirait tout (dont Jésus) à lui. L’expression est relativement floue, qui nécessitera, dans les chapitres suivants, un éclaircissement notable. Il faut encore porter sa « croix » : on connaît bien cet objet de supplice utilisé par les Romains pour les condamnés à mort ; Pierre ne pouvait pas ignorer sa signification, bien avant la crucifixion de Jésus sur le Golgotha. L’accent est mis ici sur la croix de chacun, « sa » croix, renvoyant chaque disciple à sa vie personnelle. Enfin, il faut « me » suivre, dit Jésus. Le jeu des pronoms est significatif d’une relation étroite entre la vie du croyant, avec ses épreuves et ses fardeaux, et la présence de Jésus. La phrase, relativement elliptique, est bien posée comme centrale dans la réflexion et l’enseignement de Jésus : les versets 24 à 26 le montrent encore, en ramenant le propos de Jésus à une question de vie et de mort. Il s’agit de perdre sa vie, ou de la sauver, de la gagner. L’élargissement, ici encore, est universel : au-delà de Pierre et des disciples impliqués dans le récit, l’enseignement s’adresse à « quiconque », à « l’homme ».

La réalisation des promesses

Le dernier verset du texte liturgique (v.27) situe alors les paroles de Jésus dans une perspective eschatologique : le Fils de l’homme doit venir et faire justice aux hommes, selon leurs actes. Il faut noter le terme grec concret utilisé ici : non pas les « actes » ou les « oeuvres » humaines, mais bien la praxis, mot utilisé au singulier, c’est-à-dire la manière de vivre active, la conduite concrète générale. Le texte liturgique a omis un ultime verset (v.28), certes difficile à interpréter : « En vérité je vous le dis : il en est d’ici présents qui ne goûteront pas la mort avant d’avoir vu le Fils de l’homme venant avec son Royaume ». Le propos est ambigu, situant le retour du Christ dans un lien au présent des acteurs du récit, comme aussi dans l’actualité des lecteurs appelés à être disciples... Une traduction meilleure proposera de remplacer la préposition avant par jusqu’à (en grec, heôs) : la perspective ne peut être d’attendre, comme en anticipation, une venue annoncée, mais de tendre, au-delà de la mort, vers (jusqu’à) la réalisation des promesses de Dieu enfin accomplies.

Joël Rochette



Feu Nouveau la revue au service des équipes liturgiques, des cercles bibliques et des célébrants.